L’endométriose, une maladie encore mal connue : quand la douleur s’invite dans la sexualité
L’endométriose est une maladie hormono-dépendante de type inflammatoire dans laquelle des tissus semblables à l’endomètre se logent en dehors de l’utérus. Le mécanisme actuel est encore inconnu et est sujet de multiples hypothèses rendant le diagnostic et le traitement très compliqué. C’est une maladie décrite comme systémique car elle peut toucher le corps entier. On peut retrouver des lésions dans d’autres organes tels que les poumons, le côlon, la vessie, le péritoine, les ligaments utéro-sacrés, le diaphragme, …
Plan de l'article
Comprendre l’endométriose et ses implications
Les différents types d’endométriose :
Il y a trois formes d’endométriose selon la Haute autorité de santé et le Collège national des gynécologues et obstétriciens de France (CNGOF) en 2017 :
- Superficielle
- Profonde
- Ovarienne
L’adénomyose est une forme d’endométriose qui se situe à l’intérieur du myomètre (muscle de l’utérus).
Prévalence :
L’endométriose touche environ 1 femme sur 10 en âge de procréer (estimation basée sur un diagnostic posé) : soit environ190 millions.
Elle peut apparaître dès les premières règles et peut durer jusqu’à la ménopause. (OMS article du 24/03/24)[1]
Les symptômes fréquents, visibles et invisibles : au-delà de l’utérus
Les symptômes de l’endométriose sont des douleurs pelviennes chroniques, des douleurs neuropathiques, des dysménorrhées, des ménorragies, des troubles digestifs et urinaires, une fatigue chronique, des dyspareunies et parfois de l’infertilité.

Le diagnostic de l’endométriose :
Le parcours diagnostique de l’endométriose est complexe et semé d’embûches. En moyenne, on retrouve 7 à 10 ans d’errance médicale[2] avant d’obtenir le diagnostic d’endométriose.
L’entretien clinique complet est primordial pour orienter le diagnostic. Une échographie intra-pelvienne est d’abord réalisée en première intention, ensuite une IRM dans le but d’évaluer l’étendue des lésions en deuxième instance[3]
Dans presque 50% des cas, l’examen IRM ne présente pas d’anomalies mais si les patientes présentent des douleurs importantes et résistantes au traitement pharmacologique, une laparoscopie exploratrice peut être proposée.
Ce n’est pas dans la tête des patientes.
Sources :
- https://www.who.int/fr/news-room/fact-sheets/detail/endometriosis
- INSERM, Dossier de presse, « Fertilité, endométriose : l’Inserm fait le point sur les recherches », avril 2019.
- Collinet, P., Fritel, X., Revel-Delhom, C., Ballester, M., Bolze, P. A., Borghese, B., ... & Canis, M. (2018). Prise en charge de l’endométriose: recommandations pour la pratique clinique CNGOF-HAS (texte court). Gynécologie Obstétrique Fertilité & Sénologie, 46(3), 144-155.
Quand la sexualité devient douloureuse :
Un des symptômes de l’endométriose est la dyspareunie, c’est-à-dire, une douleur lors des rapports sexuels.
Lorsqu’on a de l’endométriose profonde, on retrouve souvent des nodules au niveau des ligaments utéro-sacrés et un périnée hypertonique renforçant les douleurs lors de la pénétration, menant souvent à un diagnostic de vaginisme.
La fatigue chronique est assez importante et cumulée aux dyspareunies et aux traitements hormonaux, la libido peut être impactée. L’anticipation de la douleur provoque une baisse de désir et le plaisir est altéré. Les femmes atteintes d’endométriose culpabilisent de ne pas avoir une vie sexuelle épanouie et des frustrations peuvent s’installer dans le couple.[4]
Sources :
4. P. Norinho, M.M. Martins, H. Ferreira, A systematic review on the effects of endometriosis on
sexuality and couple’s relationship, Facts Views Vis. ObGyn. 12 (2020) 197–205.
Infertilité, sexualité altérée : des épreuves à surmonter à deux :
L’importance d’une communication sincère :
Les couples dont la femme est atteinte d’endométriose rencontrent un bouleversement au sein de la dynamique de couple. Non seulement sur le plan de la sexualité mais également sur celui des tâches quotidiennes, notamment à cause de la fatigue chronique : activité physique, sorties, travail. Il y a parfois de l’incompréhension au niveau du partenaire ainsi qu’une culpabilité de provoquer plus de douleurs.
L’infertilité :
Selon EndoFrance, on retrouve environ 40% de cas d’infertilité dus à l’endométriose.
On estime que 20 à 50% des femmes qui consultent pour une infertilité ont une endométriose et que 30 à 40% des patientes qui ont une endométriose ont un problème d’infertilité[5]. Les femmes en difficulté de procréer portent la culpabilité de ce « corps qui ne fonctionne pas ».
Sources
5. CANIS, M., POULY, J. L., WATTIEZ, A., MAGE, G., & CHU, C. F. (2003). ENDOMETRIOSE ET INFERTILITE. CANIS, M., POULY, J. L., WATTIEZ, A., MAGE, G., & CHU, C. F. (2003). ENDOMETRIOSE ET INFERTILITE.
Altération de la sexualité :
Si des lésions se situent au niveau des ligaments utéro-sacrés, la fonction sexuelle peut être altérée (Ferrero, 2005). Parfois, le col de l’utérus peut être plus sensible et certaines positions peuvent être douloureuses. L’utilisation de « Onhut » par exemple peut être conseillée.
La pénétration n’étant qu’une forme de rapports sexuels, il peut être intéressant d’explorer d’autres méthodes. Renouer avec son corps, ressentir du désir et du plaisir doit se faire de manière douce, bienveillante et sécurisante avec son partenaire. Se faire aider d’un sexologue afin d’orienter les couples dans leurs difficultés sexuelles est important.
Comment en parler à son ou sa partenaire :
Créer un espace d’écoute et de confiance :
La communication est essentielle. Si les couples ont des difficultés de communication, ils peuvent s’éloigner à cause de l’impact des symptômes dans le quotidien. L’infertilité peut être un sujet émotionnellement prenant et pouvant créer une distance dans le couple.

S’informer :
Soutenir une femme atteinte d’endométriose commence par la prise d’information. Il est important que le.la partenaire s’informe sur la maladie en elle-même ; ses implications et les symptômes dont souffre sa partenaire. En effet, chaque endométriose est différente et chaque femme est différente. Elles ne vont pas toutes manifester les mêmes symptômes face à la maladie. Tout dépend du positionnement des lésions par exemple. Certaines femmes vont avoir plus ou moins de douleurs au quotidien, d’autres n’ont pas de douleurs quotidiennes mais présentent des dyspareunies importantes, elles ne sont pas toutes égales face à la maladie. Il est important d’écouter les plaintes, de ne pas minimiser la douleur et d’accompagner sa partenaire dans ses difficultés.
Quand faire appel à un professionnel ?
Gérer ses douleurs quotidiennes :
Consulter un professionnel de la santé spécialisé dans les douleurs pelviennes peut s’avérer être une bonne idée.
La prise en charge de l’endométriose se fait de manière multi-disciplinaire. Afin de pouvoir gérer les douleurs quotidiennes, il est important de se faire accompagner par de la kinésithérapie périnéale afin de détendre le périnée hypertonique[6] , l’ostéopathie, la psychologie, la sexologie, la diététique, mais également un accompagnement avec un urologue ou un gastro-entérologue pour les troubles vésicaux et digestifs. Bien sûr, un gynécologue spécialisé en endométriose est primordial.
Les patientes peuvent également s’orienter vers de l’hypnose pour gérer leurs douleurs quotidiennes, l’aromathérapie, les TENS ou encore de l’acupuncture. Une bonne alimentation anti-inflammatoire aide à diminuer l’inflammation. Avoir un bon suivi diététique est important pour être orientées correctement en fonction de ses besoins.
En prenant une approche multi-disciplinaire, nous pouvons alors agir sur les deux volets : le corps et l’esprit. L’anticipation de la douleur et le mécanisme d’évitement qui en découle peut influencer la perception de la douleur. Avoir un travail combiné corps et esprit est plus efficace dans la prise en charge des douleurs pelviennes chroniques. Un suivi psychothérapeutique sur l’anticipation de la douleur, les éventuels traumatismes qui peuvent maintenir des tensions douloureuses au niveau du corps et une approche en sexologie peuvent aider à avoir une meilleure gestion de sa maladie et de ses douleurs.
Conclusion :
L’endométriose est une maladie inflammatoire, hormono-dépendante complexe. Elle impacte la qualité de vie des femmes mais également le couple. Tant au niveau de la sexualité qu’au niveau de la gestion des tâches quotidiennes. Tout le bouleversement hormonal, les douleurs intenses et persistantes pendant et en dehors des règles viennent perturber la dynamique de couple. Avoir un bon suivi multidisciplinaire est la clé pour gérer son endométriose et ses douleurs pelviennes. Compréhension, communication, bienveillance sont primordiales pour une sérénité dans le couple. N’hésitez pas à consulter dès que vous en ressentez le besoin.
Des ressources pour ne pas rester seule
EndoSens.com (@Endo_Sens) : https://www.endosens.com
Toi Mon Endo (Belge)
TENS : https://www.bluetens.com/fr/
Bibliographie :
Abril-Coello R, Correyero-León M, Ceballos-Laita L, Jiménez-Barrio S. Benefits of physical
therapy in improving quality of life and pain associated with endometriosis: A systematic
review and meta-analysis. Int J Gynecol Obstet. 2023;162(1):233 43.
CANIS, M., POULY, J. L., WATTIEZ, A., MAGE, G., & CHU, C. F. (2003). ENDOMETRIOSE ET INFERTILITE. CANIS, M., POULY, J. L., WATTIEZ, A., MAGE, G., & CHU, C. F. (2003). ENDOMETRIOSE ET INFERTILITE.
Collinet, P., Fritel, X., Revel-Delhom, C., Ballester, M., Bolze, P. A., Borghese, B., ... & Canis, M. (2018). Prise en charge de l’endométriose: recommandations pour la pratique clinique CNGOF-HAS (texte court). Gynécologie Obstétrique Fertilité & Sénologie, 46(3), 144-155.
Freydier, M., Baude, C., Barmaki, M., Plantevin, F., & Arcagni, P. (2023). Prise en charge de la douleur chez les patientes atteintes d’endométriose: proposition d’une stratégie thérapeutique. Douleurs: Évaluation-Diagnostic-Traitement, 24(3), 147-155.
Ferrero S, Esposito F, Abbamonte LH, et al. Quality of sex life in women with endometriosis and deep dyspareunia. Fertil Steril 2005;83:573-9.
INSERM, Dossier de presse, « Fertilité, endométriose : l’Inserm fait le point sur les recherches », avril 2019.
P. Norinho, M.M. Martins, H. Ferreira, A systematic review on the effects of endometriosis on
sexuality and couple’s relationship, Facts Views Vis. ObGyn. 12 (2020) 197–205.
S. Klein, T. D’Hooghe, C. Meuleman, C. Dirksen, G. Dunselman, S. Simoens, What is thesocietal burden of endometriosis-associated symptoms? a prospective Belgian study, Reprod. Biomed. Online. 28 (2014) 116–124. https://doi.org/10.1016/j.rbmo.2013.09.020.
Romerio, A. (2020). L'endométriose au travail: les conséquences d'une maladie chronique féminine mal-reconnue sur la vie professionnelle. Connaissance de l'emploi, (165).